
Exposition La Grande Parade des chats. Damien Colcombet & Leonor Fini
Du 5 juillet au 4 octobre 2025
Pour sa 5e exposition à Saint-Malo, Damien Colcombet, sculpteur, présente une cinquantaine de bronzes, dont ses premiers chats, associés aux lithographies issues de La Grande Parade des chats de Leonor Fini, artiste qui figure aujourd’hui dans plus de 25 musées dans le monde.
Œuvres de l’exposition La Grande Parade des chats. Damien Colcombet & Leonor Fini
La Grande Parade des chats
Jamais, peut-être, en quarante-deux expositions, le Centre Cristel Éditeur d’Art n’avait abordé un sujet d’une telle importance… Pensez donc : le plus éminent des amis de l’homme ! Non pas forcément le meilleur, non pas forcément le plus doux ou le plus fidèle, mais, pour parler comme l’écrivain Louis Nucéra, auteur de Sa majesté le Chat, « ce chef-d’œuvre de la nature qui sait ce que dignité et solennité signifient ». On le rapporte par souci d’édification : le prophète Mahomet lui-même, plutôt que de déranger sa chatte Muezza qui dormait lovée dans un pan de son caftan, préféra trancher largement le tissu. Geste révélateur s’il en est, à rapprocher des premières vénérations observées sur les murs des temples d’Égypte ou de la Grèce ancienne. Et n’a-t-on pas découvert, en 2020, au sud-ouest du Pérou, sur le flanc d’une colline, le dessin d’un immense chat de 37 mètres, tracé entre l’an 100 et l’an 200 avant notre ère ? Hommage, certainement, que les Indiens offraient aux dieux, afin de consacrer celui que Louis Nucéra appelait le « plus sophistiqué des animaux ».
Respectable animal, en effet… Selon les linguistes, un nom venu du latin populaire catus. Pour Carl von Linné, un mammifère carnivore appartenant à l’espèce des félins. Et pour notre cher Damien Colcombet, régulièrement admiré dans la presse comme « le meilleur sculpteur animalier français dans la veine figurative », un défi artistique qu’il n’aura finalement relevé qu’après… vingt années de pratique ! Vingt années qui ont fait de lui le prodigieux propagateur des grands félins de la terre, les lions, les tigres, les guépards, les panthères, les léopards, les lynx ! Pourquoi, diable, ce créateur hors de pair, également célèbre pour ses éléphants, ses rhinocéros, ses girafes et ses animaux domestiques, pourquoi ne s’était-il pas encore attaqué au chat ? Sans doute pour des raisons personnelles, parce que son enfance s’était déroulée parmi des chiens. Ou peut-être attendait-il, dans l’esprit des maîtres classiques, d’atteindre à son propre sommet ? Le saviez-vous ? « L’idéal du calme est dans un chat assis », affirmait Jules Renard. Pour notre bonheur, Damien Colcombet a modelé un chat assis, puis un chat en marche. Le grand fauve s’est fait chat !
Dommage que Damien Colcombet n’ait point connu Leonor Fini, l’une des principales artistes du xxe siècle… Une artiste figurative, elle aussi, née en Argentine en 1907 et décédée par inadvertance à Aubervilliers, en 1996. Dans l’histoire de l’art, elle incarne une singulière égérie, d’une beauté capiteuse et sensuelle, et même transgressive, qu’André Breton rêvait d’accueillir parmi les surréalistes. Vœu pieux : farouchement indépendante, Leonor Fini, peintre, graveuse, lithographe, décoratrice et costumière, entendait s’employer seule ! Tantôt elle charmait, tantôt elle effrayait, multipliant extravagances et colères. Mais la vérité est qu’elle fascinait, enchaînant commandes et succès, jusqu’à être honorée dans de très prestigieux musées. D’ailleurs, cette gloire lui a survécu : en mai 2021, aux enchères, chez Sotheby’s, à New York, son Autoportrait au scorpion, peint en 1938, était disputé par des collectionneurs au prix astronomique de 1 921 525 euros !
Au cours de sa longue carrière, Leonor Fini s’était créé deux mondes bien à elle. Le premier, le plus vaste, ressortissait à la sphère fantastique, qu’elle peuplait régulièrement de personnages androgynes, souvent pervers. Le second relevait de la fantaisie, et de son amour fou pour les chats. N’en rassemblait-elle pas dix-sept dans son appartement labyrinthique de la rue de La Vrillière, à Paris ? Et quelque trente pensionnaires dans sa villa de Corse ?! Des chats à son image, auxquels elle prêtait toutes les poses, tous les masques, tous les jeux, toutes les rondes. Aussi est-ce une joie, pour le Centre Cristel Éditeur d’Art, d’associer Damien Colcombet à celle qui dessina, de sa main formidable, les soixante lithographies colorées de La Grande Parade des chats. C’était en 1973, à l’invitation des éditions Agori. Et c’était drôle. C’était poétique. C’était beau. Très beau !
Christophe Penot
Éditeur d’art